Jeudi saint

Méditation Jeudi Saint 2018, Le lavement des pied,  Jean 13. 

 IMG_20180328_201949Le roi acclamé dans l’incompréhension et le quiproquo des Rameaux maintenant se dévoile.

Le roi troque sa couronne contre un torchon, un tablier.

 Cette fois encore, Pierre n’a rien compris !

Car Pierre, lui, a le sens de la hiérarchie. Il a le sens de ce qu’il faut faire ou non.

Et Pierre le sait bien : un maître ne lave pas les pieds de ses disciples.

Ce geste est celui d’un esclave, ou d’un amant.

Mais pas celui du Seigneur.

Pas de cet homme que Pierre suit depuis 3 ans déjà. Cet homme en qui lui et ses amis ont mis tout l’espoir d’Israël.

Pas cet homme que petit à petit ils apprennent à reconnaître comme le Messie, l’envoyé, l’oint de Dieu.

Non, décidément, un tel libérateur d’Israël, un futur roi ne peut poser un tel geste, celui de l’esclave, ou celui de l’amant.

Car seul l’esclave recevant le maître, seule l’épouse accueillant son mari accomplissaient ce geste !

Il faudrait relire ici le récit -johannique également- de l’onction à Béthanie, qui précède d’un chapitre notre péricope, pour percevoir le lien qui est fait par le 4ème évangile entre les deux gestes :

– celui de la femme qui essuie de ses cheveux les pieds du Christ

– et celui du Christ qui essuie les pieds des disciples.

Un petit verbe, « essuyer », qui n’apparaît qu’à ces deux occasions, dans tout l’évangile de Jean…

 Pourtant, Jésus est là.

Il s’est dévêtu, et il a mis un torchon comme tablier.

Le voilà à genoux.

Devant Pierre.

Devant toi.

Devant nous réuni ce soir.

 Mon frère, ma sœur, l’acte est colossal :

Dieu en tablier,

Dieu à genoux,

Dieu esclave,

Dieu amant.

Pierre ne pouvait pas comprendre.

Il ne pouvait pas accepter un tel geste.

Car ce geste s’en vient à jamais bouleverser notre idée même de Dieu.

Le Messie attendu est un messie inattendu.

Ce geste, pourtant, est colossal. Il se passe de mots.

Il n’y a qu’à contempler :

 Un Dieu à genoux. Un roi-serviteur. Un roi pour le service.

Un Dieu pou r servir l’Homme.Scandale. Folie. Et pourtant !

 Et une parole : « Vous aussi, faites ceci » !

Un geste et des mots qui s’en viennent à jamais briser la loi de la violence dans nos humaines relations, un geste qui s’en vient briser à jamais nos idées de hiérarchie et de dignité.

 Voilà la suprême dignité : être suffisamment détaché du souci de soi, de son ego, pour pouvoir prendre le risque de l’agenouillement.

Il ne s’agit pas ici d’humiliation, mais d’un renversement complet de notre logique humaine et sociale.

Inventant du même coup pour nous une nouvelle grammaire relationnelle : Servir ou se servir, telle sera désormais la question…

 Un geste qui nous ouvre à une vie nouvelle, une vie de service,

où il n’y a plus à prouver, à être grand, fort, puissant, sachant et pouvant, mais seulement à être prêt non seulement à donner, mais d’abord à recevoir !

Donner et à recevoir… Telle est la grammaire de la grâce, celle de la foi !

 Et surtout, mon frère, ma sœur, n’oublie jamais :

désormais, chaque fois que tu trébuches, que la vie se fait trop lourde, et que tu tombes à genoux, c’est face à face avec le Christ que tu te retrouves.

Un Dieu-serviteur, à genoux pour laver et guérir, pour relever et bénir.

Pasteur Jean-François Breyne